Review: Hitler – the rise of Evil (2003)

Hitler: the Rise of Evil (c) CBS / CBC

Hitler: the Rise of Evil (c) CBS / CBC

Réalisée par Christian Duguay (the Art of War, Coco Chanel, Jappeloup), Hitler – the rise of Evil est une mini-série canadienne en deux parties basée sur des faits historiques retraçant l’ascension d’Adolf Hitler jusqu’aux plus hautes sphères de l’Etat allemand. La série a été diffusée simultanément au Canada et aux Etats-Unis sur les chaînes CBC et CBS en mai 2003, puis en janvier 2004 en France. 

Que la période nous ait passionné ou glacé le sang (ou même les deux en même temps), on se souvient tous de nos cours d’Histoire sur les grands totalitarismes du XXème siècle pour différentes raisons. Sans non plus sauter directement sur une transition facile, j’avais envie de parler de cette mini-série au lendemain des résultats des élections Européennes. Britannique – écossaise – de souche, française d’adoption, je considère ces deux pays comme mes deux maisons. Et les voir toutes les deux se renfermer sur elles-mêmes en désignant assez massivement – compte tenu du taux d’abstention parce que là aussi tout est relatif – des partis populistes, un peu racistes sur les bords, et foncièrement hostiles à l’Europe pour les représenter m’a très franchement secouée. Mais laissons-là l’actualité pour en venir à Hitler: the rise of Evil, sur lequel il y a également beaucoup à dire en termes de repli identitaire débouchant sur absolument tout sauf du travail pour tous, du bonheur et des paillettes pour le peuple allemand de l’époque. Une review doublement d’actualité, puisqu’il y a un peu plus de 70 ans le Général De Gaulle lançait son fameux appel radiodiffusé par la BBC depuis Londres.

A la base, le premier script avait été sur-vendu par CBS – encore elle ! – comme un film traitant de la jeunesse d’Hitler. Bien entendu, tout le monde s’est immédiatement imaginé qu’il s’agirait de suivre un Hitler adolescent, sortant avec des filles et faisant des trucs d’adolescents… et forcément, ça a révulsé et indigné pas mal de monde. Attaquée de toute part aussi bien par la Ligue Anti-Diffamation, la presse et les critiques avant même que les premières images n’aient été tournées, CBS a pris le parti de faire réécrire le script du film par John Pielmeier (the Pillars of the Earth, World without End…).

C’est l’histoire d’un mec…

Adolf Hitller était un enfant qui ne s’est jamais senti à sa place dans sa famille. Ce sentiment n’a pas disparu en grandissant et le rejet qu’il a subi par l’école des Beaux-Arts de Vienne l’a énormément bouleversé. Il s’engage par la suite dans l’armée, avant de lancer sa carrière dans la politique et commettre toutes les atrocités dont le monde a été le témoin et la victime.

[ Allociné ]

La mini-série met l’accent sur le développement personnel d’Hitler et sur la naissance du mouvement National-Socialiste, démontrant avec efficacité que sans le soutien du peuple et des grands capitalistes allemands, le « phénomène » Hitler se serait rapidement essoufflé et le Troisième Reich n’aurait sans doute jamais vu le jour – un point que beaucoup essaient encore d’oublier aujourd’hui, comme pour se rassurer. C’est précisément parce que la démonstration est efficace et sans trop de parti-pris que the Rise of Evil est angoissant: on connait déjà la fin, on sait déjà de quelles horreurs il sera question donc l’exercice ne tient pas à comment la fin sera amenée, mais plutôt à la manière dont le cheminement sera mis en valeur.

Historiquement fidèle (à quelques incohérences scénaristiquement arrangeantes près) et non enrichie de scènes prévues pour raccoler ou « faire plus spectaculaire », cette mini-série apporte les éléments qu’il faut pour comprendre comment un tel monstre de haine et de racisme a pu ainsi gravir les marches jusqu’à la plus haute fonction de l’état allemand. On assiste à ce parcours en s’attardant sur quelques épisodes forts de sa vie personnelle, avec en trame de fond les mutations successives du parti nazi. Si la première partie est assez neutre, la seconde avait peut-être un peu trop tendance à « humaniser » ce personnage détestable.

Le seul point vraiment faible est ce traitement un peu rapide de la tentative de putsh de novembre 1923, dont les conséquences échapperont en partie à ceux qui étaient les moins attentifs en cours d’Histoire. Sur ce point à mon sens, on a surtout privilégié la facilité pour se concentrer sur d’autres aspects postérieurs à cet événement (le début de l’écriture de Mein Kampf, notamment…). Le final est également assez facile et nous laisse à l’aube de 1934 avec des citations qu’on lit solennellement et avec un air grave en se remémorant que ce qui vient après, c’est l’Horreur avec un grand H. Je n’aurais pas préféré voir des reconstitutions de camps de concentration, mais j’ai trouvé que la fin avec les citations faciles sur fond noir tombait un peu à plat.

Robert Carlyle (en disant ça… j’ai presque tout dit !)

Un peu trop grand, silhouette un peu trop élancée… on ne peut pas vraiment dire que Robert Carlyle (the Full Monty, 28 Weeks Later, Once Upon a Time…) a été choisi pour son physique, parce qu’il est à des lieues de tous les portraits ou photos d’Hitler que l’on a pu voir. Ce que l’on peut dire avec certitude en revanche, c’est qu’il a très certainement été choisi pour son talent. Acteur caméléon, il faut voir la justesse avec laquelle il nous livre son interprétation – personification ? – d’Hitler. Ordinairement perçu à travers ses rôles comme un peu bizarre mais néanmoins sympathique à sa manière, Carlyle est ici absolument effrayant de crédibilité, magnétique, animal… Gestuelle agressive, haine des Juifs, relation malsaine avec sa nièce… tout est là. Le résultat global est vraiment bluffant. La fascination que le futur dictateur exerce sur ses disciples est bien perceptible, au moins autant que la révulsion et la peur qu’il inspire à ses ennemis.

La performance de Robert Carlyle est – heureusement – appuyée par le reste du casting, avec notamment Peter O’Toole (Lawrence d’Arabie, Troythe Tudors…), qui incarne un Chancelier Hindenburg fragile physiquement et en pleine confusion mentale mais malgré tout fier et particulièrement lucide concernant le danger que représente Hitler. Julianna Margulies (the Sopranos, E.R, the Good Wife…) est également remarquable dans son interprétation de l’épouse parfaite peu à peu fascinée par le charisme et les idéaux d’Hitler.

Rating: ★★★☆☆
Avis: Une mini-série efficace et servie par un bon casting. Quelques incohérences et raccourcis sans doute dus à la nécessité de ne pas excéder une certaine durée, et également quelques lenteurs sur certaines scènes pas réellement essentielles… J’ai apprécié la manière dont a été mise en scène la période de l’accession d’Hitler au pouvoir, et également le fait qu’on n’ait pas cherché à le rendre plus « sympathique » (même si c’est quelque chose que je reproche à la seconde partie) ou plus humain qu’il ne l’était. Tous les personnages n’étaient pas développés à égalité, et chacun aurait pu être étoffé convenablement ou avec un troisième épisode, ou avec une suppression de toutes les longueurs ou scènes pas franchement utiles. Il y avait beaucoup à dire sur le sujet cependant, et l’exercice était loin d’être aisé… c’est donc partiellement réussi, de mon point de vue.

Originaire de Livingston au Royaume-Uni, elle est diplômée d’un Bachelor degree en Communication et d’un Master de Commerce obtenu en France. Assistante de production dans un laboratoire audiovisuel britannique le jour, elle consacre la plupart de ses nuits au visionnage de séries et films en tous genres et s'est mis en tête de voir tous les Musical présentés à West End.

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