Review: Merlin « the Diamond of the Day »

Merlin (c) BBC Cymru Wales Colin Morgan (Emrys)

Merlin (c) BBC Cymru Wales
Colin Morgan (Emrys)

Peu de séries tout public peuvent se vanter d’avoir connu une telle longévité et d’avoir à ce point rencontré leur public. Peu de séries peuvent également se vanter d’avoir su convaincre des fans de tous âges et de tous continents à une époque où Internet favorise la surconsommation de séries en tous genres, encourageant une tendance à sauter d’un type de série à un autre avec une facilité sans doute déconcertante pour les principaux acteurs du secteur audiovisuel. Autant dire qu’une série capable de se renouveler suffisamment pour être présente en prime time sur la BBC pendant 5 saisons consécutives a quelque chose d’assez étonnant par les temps qui courent.

Les premières saisons ont été une succession d’épisodes pas nécessairement bien écrits, avec des intrigues assez basiques sur le modèle « tout va bien, un méchant arrive, on lui botte les fesses, et après on se fait des calins » – et encore, cette phrase est d’une qualité narrative supérieure à celle de certains épisodes de la première saison… Il aura donc fallu quelques temps aux scénaristes pour trouver leur rythme, et surtout pour réussir à proposer un show de qualité qui puisse réellement prétendre passer après le Robin Hood tout juste terminé (on vous en reparlera très prochainement), et meubler un peu l’espace à une période où Doctor Who n’était pas diffusé. Autant dire que la place à occuper était énorme. A terme, on peut largement dire que les saisons 4 et 5 ont vraiment occupé cet espace. Et admirablement, malgré quelques épisodes un peu plus faibles que d’autres (citons simplement le plus décevant: With all my Heart ).

« The Diamond of the Day » s’annonçait comme l’épilogue en deux parties des aventures de Merlin et Arthur. De ce point de vue, le paquet avait été mis sur la promotion avec pas loin de trois teasers différents par épisode. Des teasers suffisamment bien montés pour ne laisser entrevoir que quelques bribes de ce qui nous attend sans pour autant spoiler la fin – un progrès notable quand on compare avec les teasers des saisons précédentes. Alors est- ce que les scénaristes ont tenu leur pari et réussi à nous proposer une fin à la fois grandiose et mémorable ? On se penche tout de suite sur la question…

Qui dit épisode final dit également dénouement de toutes les intrigues en cours et de ce point de vue là il y avait beaucoup à faire, ce qui rend logique le découpage en deux parties du « final », soit à peu près 1h30 apporter une conclusion à cinq saisons. Toute la difficulté était là, parce qu’il ne suffisait pas de jeter tous les éléments pêle-mêle en laissant les spectateurs saisir ce qu’ils voulaient – et pouvaient – mais qu’il était nécessaire de tout condenser pour que chaque dénouement d’intrigue puisse entrer dans ce format d’1h30. Un pari apparemment impossible, risqué… mais qui a quand même relativement bien été tenu. Je dis « relativement » et développerais à ce sujet un peu plus bas.

La Team Rocket

On savait depuis l’épisode précédent que Morgana (Katie McGrath) & Mordred (Alexander Vlahos) étaient alliés et projetaient de tuer Arthur (Bradley James) autant que de se débarrasser de Merlin (Colin Morgan). On les retrouve dans cet épisode plus complices que jamais, unis par un but commun et une haine sans borne de ceux qui ont passé le plus clair de leur temps à contrecarrer leurs plans, à persécuter leurs semblables. La liste pourrait encore s’allonger tant les griefs à l’encontre de Merlin et Arthur sont nombreux lorsque l’on se place du côté de Morgana et Mordred.

Dans la première partie, nous faisons connaissance avec une brave paysanne rescapée d’un raid saxon sur son village, un peu au nord de Camelot. Les chevaliers l’emmènent avec eux, et assez rapidement Gwaine (Eoin Macken) se prend d’affection pour elle… Après toutes les manigances de Morgana, on sentait plus ou moins venir celle qui consistait à placer sur le chemin d’un proche d’Arthur aux vices bien connus une jeune femme en détresse et bien décidée à prouver sa reconnaissance par tous les moyens imaginables. L’espionne est démasquée lorsqu’il est déjà trop tard et qu’une information capitale a déjà été transmise à l’ennemie, et c’est sans trop de remords de la Reine condamne la traitresse à la pendaison sur la place publique.

Le plan diabolique de Morgana se met en place peu à peu, à présent qu’elle a obtenu l’information qui lui faisait défaut depuis deux saisons concernant l’identité d’Emrys. Comme à chaque fois, la jeune femme met la main sur une créature magique sortie d’on ne sait trop où – à croire qu’elle les tire du néant ou qu’on les invente pour elle… mais bref – et envoie un petit cadeau à Merlin. Là encore, on ne se demandera pas comment le cadeau a pu arriver à destination malgré une garde renforcée dans Camelot, mais Merlin le reçoit bel et bien: la ventouse magique aspire la magie hors de lui, et le jeune homme n’est sauvé que par l’intervention de Gaius (Richard Wilson)… Une bonne chose de faite pour Morgana, qui a souvent vu plus de plans tomber à l’eau que vraiment réussir.

Pour son nouvel allié, Morgana forge une épée indestructible dans le souffle d’Aithusa, son dragon. Cette épée étant sensée lui permettre de mener un combat d’égal à égal – ou quasiment… – face à l’Excalibur d’Arthur. Gardez bien à l’esprit le fait que cette épée soit indestructible, parce qu’on en reparlera par la suite…

Knight Fever, ou la bataille de Camlann

Camlann. Une espèce de carrière craieuse encaissée dans une cuvette. L’endroit parfait pour mener ce qui s’annonçait être la bataille du siècle. D’un côté, Morgana, son dragon, et une armée de saxons menée par Mordred. De l’autre, les troupes de Camelot au grand complet menées par Arthur qui cette fois-ci ne jouira pas de la protection de Merlin. On en frémissait d’avance dès le départ, non pas parce qu’Arthur n’a aucun mérite au combat, mais parce qu’il y a certaines batailles importantes qui ne souffrent pas que l’on prenne le moindre risque, notamment lorsque l’issue du combat est encore incertaine. D’ailleurs, Arthur lui-même sembme affecté par l’absence de Merlin, même s’il n’est encore officiellement que le pire écuyer du monde à ce stade de l’histoire…

Lorsque l’offensive est lancée, on se laisse gagner par la nervosité et on cherche fébrilement dans la mêlée une trace des visages connus parmi les dizaines de figurants. Le screenplay est absolument magnifique, et l’addition de plans en semi-ralenti aux moments les plus critiques contibue à nous immerger encore un peu plus dans le chaos de cette bataille où tous les coups semblent permis. Tant et si bien que la fièvre nous gagne et que l’on se surprend à vouloir que tous ces saxons passent par le fil de l’épée d’un chevalier – même un débutant, à la limite. Et alors que la bataille fait rage, un visage connu semble surgir de nulle part. Un visage connu déformé par la haine et semblant n’avoir plus d’yeux que pour Arthur, trop occuper à botter autoritairement des fesses saxonnes pour assurer ses arriéres… Et bim, la lame du jeune Mordred ne tarde pas à s’enfoncer dans ses chairs avec une facilité abdolument horrible. Une lame spéciale dotée de sa propre jauge de mana (on me pardonnera cette allusion) qui booste les dégats infligés et rend la blessure impossible à guérir parce qu’on l’a forgée dans le souffle d’un dragon. Un dragon sans doute un peu gâleux sur les bords si on en juge par le morceau que perd cette lame soit-disant indestructible. Bref, on nous a honteusement trompés sur la marchandise !

Mais du coup, cet éclat de lame prétendument indestructible fournit l’accélérateur dont l’action avait besoin pour tendre vers la fin: Arthur est blessé et Mordred s’apprète à l’achever… mais c’était sans compter sur les ressources visiblement inépuisables du Roi, qui se débarrasse de son assaillant en quelques secondes et au prix d’une botte assez remarquablement exécutée. Et là, on se dit que Mordred va se relever et que le combat va s’engager… On attend encore en se disant qu’en fait, il pourrait même rester allongé et tuer Arthur en utilisant la magie… Et en fait, aucune des deux possibilités ne s’avère être la bonne, parce que les scénaristes ont simplement décidé que Mordred devait mourir en 45 secondes. Sérieusement ?! Le potentiel de cet affrontement laissé de côté pour conclure sur un « il l’a attaqué en traître, mais au final il est mort donc c’est bien fait pour lui » décidément un peu trop simple, ou un peu comme s’il n’y avait pas assez d’1h30 d’épisode pour creuser un  peu et évoquer des regrets, ou même débuter un semblant de dialogue entre deux coups d’épée. Mais tout de même, Arthur s’écroule parce que quand même, tuer un ennemi mortel en 45 secondes ça épuise son homme.

On assiste parallèlement au retour d’Emrys sur le champ de bataille – ou plutôt sur la falaise qui le surplombe – et à une déferlante d’effets spéciaux de mauvaise qualité dignes de n’importe quel épisode de Xéna il y a plus de 15 ans. Pour côté kitsch autant que pour le fait de ruiner l’intensité dramatique de l’intervention du druide, on remerciera les coupes de budgets dont la série a été victime passé le milieu de saison. Une fois ces considérations purement esthétiques laissées de côté, on peut apprécier sans s’en cacher la déculottée magique administrée autant à Morgana et à son horrible dragon qu’aux Saxons.

La relation Arthur / Merlin

« the Diamond of the Day » nous donne ce que l’on attend depuis un moment concernant cette relation si particulière. Une scène tellement attendue qu’elle ne pouvait survenir avant un moment critique du récit, et la blessure mortelle d’Arthur fournit un cadre idéal, feu de camp à l’appui, pour que Merlin admette être capable d’utiliser la magie.

« I’m a sorcerer. I’m with Magic. »

Merlin (Colin Morgan)

Un aveu auquel Arthur ne croit pas, préférant comme à chaque fois mettre cette phrase dénuée de sens sur le compte du côté un peu bizarre qu’il a toujours trouvé à Merlin… mais un mini spectacle pyrotechnique au-dessus du feu le ramène assez brutalement à ce qui a été dit: Merlin peut utiliser la magie, réellement, et ne le lui avoue que maintenant. La facilité aurait voulu que le choc de la révélation se dissipe suffisamment rapidement pour que cinq minutes plus tard, Arthur et Merlin se mettent de grandes claques dans le dos comme si la magie n’était pas un problème majeur. Malheureusement il n’en est rien, et cette révélation jette un froid considérable, au point que même le feu crépitant ne peut rien faire pour éviter à notre sang de geler dans l’instant.

Une réaction prévisible, en somme, surtout si l’on considère tous les actes magiques dont la famille Pendragon a été victime jusque là, et encore plus ces deux dernières saisons avec les manigances de Morgana… Alors oui, on comprend que Merlin n’ait pas eu envie de crier sur tous les toits ce qu’il était réellement, mais on comprend également qu’Arthur se sente trahi par une personne en laquelle il avait confiance et en retire une certaine frustration. La scène en elle-même est grandiose, et la confession faite avec une voie pleine de larmes nous serre le coeur: Colin Morgan est excellent dans cette scène; une chance pour nous que le premier rôle ait été si bien choisi pour nous permettre d’échapper à une parodie de cette scène ô combien capitale pour l’histoire des deux personnes. Bref, on y croit et on est à la limite d’y aller de quelques larmes pour les accompagner tant cette scène tant attendue est poignante.

Quelques scènes se succèdent, montrant un Arthur rejetant complètement celui qui a pourtant sauvé son royal fessier à maintes reprises, et un Merlin relativement indécis vis à vis de la conduite à tenir en dehors du fait de continuer à se comporter « normalement », s’occupant du jeune Roi malgré un rejet plus qu’évident de la part de ce dernier. La scène où Merlin tente d’allumer un feu avec deux pierres et quelques brindilles lance le faux espoir de voir voir les deux personnages se réconcilier lorsque Arthur lui demande pourquoi il n’utilise tout simplement pas ses pouvoirs pour gagner du temps et que Merlin explique qu’il a toujours été habitué à dissimuler ses pouvoirs par sécurité… une réponse qui sonne un peu comme un reproche, et qui clôt donc plus ou moins la conversation pour un temps.

Et progressivement, Arthur prend conscience du fait que jusqu’ici, Merlin n’a jamais cherché à être remercié ou à récolter une quelconque gloire malgré tout ce qu’il a pu accomplir. Un raisonnement qui fait son chemin dans la tête – dure – du Roi au fil des scènes, peut-être sous l’impulsion de Gaius qui, heureusement est toujours de bon conseil et aura passé cette dernière saison à essayer de désamorcer les situations conflictuelles ou en phase de le devenir. Un grand professionnel de la gestion des conflits, en somme.

« So you’re not an idiot… that was an other lie ! […] I don’t want you to change. I want you to always be you. »

Arthur (Bradley James)

C’est amené avec humour, mais Arthur relance un semblant de dialogue, et la réconciliation semble effective au travers des excuses qu’il finit par présenter à Merlin concernant la manière dont il l’a traité durant toutes ces années. Des excuses d’autant plus sincères qu’elles semblent venir de très loin. Quelques minutes plus tard, on ne peut donc que regarder s’éloigner avec une boule dans la gorge la barque où repose le Roi Arthur… Farewell, Arthur Pendragon.

Et du coup... ?

La fin de l’épisode laisse entrevoir un vieil homme évoluant à notre époque et randonnant du côté de Glastonbury, présumé être l’Avalon des légendes arthuriennes, et également abriter la tombe du Roi Arthur. Un plan un peu plus rapproché nous permet de reconnaître Emrys (Colin Morgan), qui a visiblement gagné l’immortalité. Le fait que la série se clôture sur une scène aussi inattendue prête à sourire et apporte en même temps quelque chose d’absolument unique. C’est le même type de détails incongrus qui ont donné cette originalité à Merlin, une originalité qui a notamment fait défaut à Camelot, qui se déroule à la même époque, met en scène un Arthur jeune propulsé à la tête du royaume de Camelot, qui regroupe quelques acteurs connus (Eva Green et Jeremy Fiennes, pour ne citer qu’eux), a beaucoup plus de moyens financiers pour les effets spéciaux mais qui reste malgré tout un flop ahurissant faute d’avoir trouvé un ton et un style particulier – que les scénaristes ont voulu compenser par une surabondance de scènes osées… mais là, je m’égare – qui fait que l’on se souvient de la série pour les bonnes raisons.

On peut également remercier les scénaristes de ne pas avoir improvisé une boucherie dans les personnages principaux, même si une bataille de cette envergure aurait logiquement du faire beaucoup plus de morts dans les rangs des chevaliers. Il n’y aura donc à déplorer que la mort de Gwaine, tombé entre les mains de Morgana et torturé jusqu’à ne plus avoir la force de résister à quoi que ce soit…

Du côté de Camelot, on assiste également à la transmission du sceau royal à Guinevre (Angel Coulby) par Sir Leon (Rupert Young), ainsi que la proclamation officielle du règne de la Reine. Un « the King is dead. Long live the Queen ! » repris par l’ensemble des chevaliers présents et de la cour comme ultime symbole d’allégeance à une Reine dont l’importance aura été minorée jusqu’à cet épisode final, car trop souvent cantonnée au rôle de l’épouse inquiète qui assiste impuissante à des évènements dont elle comprend l’importance sans trop oser y prendre part.

Rating: ★★★★½

Avis: La clôture de la série nous en met plein les yeux du début à la fin, qu’il s’agisse d’empoignades viriles sur le champ de bataille ou de scènes à l’intensité dramatique étourdissante. La prestation de Colin Morgan est une nouvelle fois à la hauteur, et on retiendra surtout la scène où son personnage craque nerveusement un tout petit peu après la mort d’Arthur, qui est poignante au possible. Du côté des points un tout petit peu moins positifs, on peut évoquer cette impression d’avoir voulu entasser tous les éléments narratifs en vue de clôturer toutes les intrigues, mais en laissant malgré tout un boulevard pour la scène de la révélation du secret de Merlin à Arthur, qui paraît bizarrement longue en comparaison des quelques secondes consacrées à la clôture de la rivalité Arthur / Mordred, Merlin / Morgana, ou encore du départ d’Aithusa à tire-d’ailes juste parce qu’on le lui demande… et qui paraissent de ce fait presque comiques à côté de tout le reste. Malgré quelques petites ombres, ce season finale était tout de même de grande qualité !

Diplômée en Marketing / Communication et en Médiation culturelle, elle est Editrice Web et Geek à temps plein pour Britishg3eks comme dans la vie réelle. Rompue à l’exercice du reviewing et de la traduction dans le domaine du sports entertainment, passionnée de jeu de rôle et de street art, mauvaise guitariste et longboardeuse débutante, elle parcourt l'Europe et arpente villes et festivals un appareil photo à la main.

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